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Une amie que j’adore m’a offert une orchidée il y a presque deux ans. Durant sa première année à la maison, cette plante m’a gratifié de ses magnifiques fleurs pourpres sans arrêts.

Il y a un an, elle a cessé de fleurir. Plus rien. Je me suis dit alors que toute bonne chose avait une fin. Qu’une année de fleurs en fête, c’était sa contribution dans ma vie.

Les choses vivent et meurent.

Et je dois apprendre à l’accepter.

Hier, une de mes plus belles orchidées a cessé de fleurir dans ma vie. Elle s’appelle La Caravane. C’est la troupe de théâtre formée des étudiant.e.s du deuxième cycle en intensif théâtre de l’école où j’enseigne depuis 9 ans.

C’était le dernier spectacle auquel je contribuais pour les prochaines années. Parce que je pars. Et lorsque je reviendrai, les jeunes que j’ai côtoyé seront devenu.e.s des Cegepien.ne.s. Ils ne seront plus là.

C’était un de mes plus grands sacrifices. Ne plus avoir leur fleurs dans ma vie.

Ça me console de savoir qu’ils fleuriront pour d’autres, avec d’autres. Ils sont tellement sublimes. Si vous saviez…

Ce sont parmi mes humain.e.s préféré.e.s.

De toute la Terre.

Leur dernier cadeau aura été de me dédier leur ultime représentation à mes côtés.

Et moi, de leur révéler certains de mes secrets.

Je ne pensais pas avoir à te dire au revoir. Jamais. Ma naïveté est légendaire. Mais nous y voici. À l’aube de la croisée des chemins. Tu auras été un compagnon de route exemplaire. Celui qu’on espère toute sa vie. Je le sais plus que jamais, maintenant, à quelques jours de te quitter pour quelques temps. Merci pour tout ce que tu m’as apporté. Si tu savais… Si je sais partir maintenant, je te le dois en partie. D’ici mon retour, prends soin de toi. Et de ceux qui restent. La famille. Lemony a raison : tant que vous serez ensemble, vous serez une famille. Tu sauras, à partir de maintenant, mieux que jamais, me déchiffrer. Tous mes conseils pour la scène, n’auront été que des conseils pour la vie. Quand je te disais que tu jouais faux, ce que je voulais te dire, c’est que lorsque les mots ne viennent pas du cœur, ils ne valent rien. Quand je te disais que ton jeu n’était pas juste, ce que je voulais te dire, c’est que chaque geste que l’on pose doit être cohérent avec ce que nous sommes. Quand je te disais que je ne t’entendais pas, ce que je voulais te dire, c’est que tes mots sont importants, que le monde a besoin de t’entendre, et que tu dois parler avec force. Quand je te disais que je ne te comprenais pas, ce que je voulais te dire, c’est que le choix de tes mots est aussi crucial que le choix des armes dans un duel. Quand je te disais que j’étais fier de toi, ce que je voulais te dire, c’est que l’humain que je te vois offrir au monde ressemble de plus en plus à l’humain que je vois à l’intérieur de toi. Quand je te disais je t’aime, ce que je voulais te dire, c’est que si un jour j’ai à te quitter, cela me fendra le cœur, cela me terrassera. Mais la présence ou l’absence ne sont pas des paramètres de l’amour, ils n’en sont même pas les témoins. L’amour n’a ni règle, ni distance. Quand je te disais sois fort, ce que je voulais te dire, c’est ne laisse personne ébranler les fondations de ton être, ni les gens que tu aimes, ni ceux que tu détestes. Quand je te disais la vie n’est pas clémente, en des termes plus houleux, ce que je voulais te dire, c’est de ne pas attendre que les choses arrivent, mais de faire en sorte qu’elles arrivent. Quand je te disais de choisir la lumière, ce que je voulais te dire, c’est de toujours tendre vers le meilleur de toi. On ne change pas le monde, on se change soi. Et on espère que ça aura du sens. C’est ce que j’aurai tenté de faire dans ces dernières années. Avec toi. Tu vas me manquer tu sais. Beaucoup. Je t’aime. À tout jamais. Ensemble. Pour. Toujours.

Ce matin, j’ai remarqué qu’une toute nouvelle branche a poussé sur mon orchidée. Et elle m’a offert une nouvelle fleur.

J’avais tort.

Les choses ne meurent pas. Elles fleurissent différemment. C’est tout.

5 réflexions sur “(2 de 3)

  1. Un beau texte spirituel. Si, si! Regarde: « Quand je te disais de choisir la lumière, ce que je voulais te dire, c’est de toujours tendre vers le meilleur de toi. On ne change pas le monde, on se change soi. Et on espère que ça aura du sens. » Et ce matin, justement, je lutte pour changer le monde à travers moi, j’ai le choix de la colère et de l’amertume qui me taraude, et les gestes qui en découleraient, ou de choisir le meilleur de moi, mais la compassion semble un effort surhumain dans ce tout petit moment qui passera. Puis, comme ton orchidée qui semblait morte, une fleur renaîtra, qui viendra alors donner du sens à cette lutte, ce désert, cette jachère.

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  2. Ce qui est trippant avec une orchidée, c’est que lorsqu’elle se flétrie, c’est le deuil de sa beauté. Toutefois, on ne sait jamais lorsqu’elle décidera de s’offrir en cadeau une seconde fois. C’est fleur, c’est comme la vie! De beaux moments, des opportunités, des sacrifices, des deuils, mais d’abord et avant tout, des surprises! La vie quoi!

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  3. je suis émue… moi j’aimerais rajouter que tu en as fais fleurir de petites fleurs et que tu les as beaucoup aidé à s’épanouir ! Merci pour la nôtre, c’est une chance qu’on a eu, que tu passe dans sa vie… nous continuerons de veiller sur elle, bonne route et à bientôt X

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